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Roland HUREAUX

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 07:23

 UN TERRORISME NI BARBARE, NI AVEUGLE, NI INCOMPREHENSIBLE

 

Le souci de se trouver en phase avec des évènements liés au terrorisme, qui ont stupéfié beaucoup de nos compatriotes, doit-il conduire à une escalade de qualificatifs emphatiques qui n'ont pas le seul inconvénient de la répétition, voire de la trivialité, mais aussi celui d’induire en erreur sur la véritable nature du phénomène en cause ?

 

Ni barbare

 

A peu près tous les éditoriaux nous ont dit ainsi   que les attentats de Nice et de Saint Nicolas du Rouvray étaient « barbares ». Pitié pour les barbares qui méritent mieux que ça !  Au moins ceux de l'Antiquité, les vrais.  Le mot signifiait pour les Grecs, des hommes qui balbutiaient, c'est-à-dire   qu'ils ne parlaient pas le grec, ni plus tard le latin.  Aux Ve et VIe siècle de notre ère, ces hommes, Germains ou Asiates, venus du Nord et de l’Est, se sont jetés sur l'Empire romain moribond parce que, refroidissement climatique oblige, ils n’arrivaient plus à vivre chez eux. Ils en ont alors occupé la partie occidentale. Mais quand ces barbares   se jetaient sur une ville, il ne ne se livraient pas à des violences gratuites, ils pillaient les biens (le vase de Soissons !), ils violaient les femmes et même ils s’appropriaient les terres.  Rien qui, d'une certaine manière, ne sorte des bornes de la nature humaine ordinaire.

II est vrai que côté Sud, au VIIe siècles sont venus d'autres barbares, les Arabes du désert, dont les motivations de base n'étaient guère différentes mais qui en avaient une de plus : répandre l'islam. La fureur des combats passés, ils imposaient aux adeptes des religions vaincues le statut de dhimmis, c'est à dire de protégés et les contraignaient à payer un impôt spécial. Très vite, le zèle religieux se refroidissant, beaucoup de ces nouveaux maîtres ont préféré freiner la conversion des   peuples conquis pour préserver les rentrées fiscales.

 

Ni aveugle

 

On nous dit aussi que le terrorisme est "aveugle". Il est vrai qu’il suppose des dommages collatéraux importants. Ainsi   à   Nice près du tiers des victimes de la promenade des Anglais étaient, dit-on, des musulmans. Les dommages collatéraux, frappant la population civile, les Occidentaux connaissent :     20 000 civils en Yougoslavie, 500 000 en Irak, 160 000 en Libye. Les terroristes n'ont pas été les seuls à frapper en aveugles. Pourtant les terroristes - ou leurs commanditaires - ont visé chaque fois des cibles hautement significatives : un journal jugé blasphémateur (Charlie), un lieu d'amusement populaire jugé satanique (le Bataclan), la République elle-même (le 14 juillet à Nice) puis l’Eglise catholique. Le terrorisme est, on le voit, tout   sauf aveugle.

Il est vrai qu'on nous dit généralement que le meurtrier est   un forcené, un déséquilibré, quitte à se raviser ensuite. Les forcenés, les vrais, oui, sont aveugles mais la vague de terrorisme que nous connaissons aujourd'hui n'est pas, pour l’essentiel, le fait de forcenés.

 

Par-delà la haine, l'idéologie   

 

Autre lieu commun : les tueurs seraient mus par la haine la plus absolue. Nous n'avons pas eu leurs confidences puisqu’ils sont généralement morts dans les attentats. Mais depuis l'attentat de Sarajevo (1914), l'Europe a déjà une longue expérience du terrorisme.  Invoquer la haine exacerbée, c'est oublier que la plupart des meurtriers auxquels nous avons affaire ne sont que des exécutants qui se sont engagés pour une cause et ont promis d'obéir aux ordres quels qu’ils soient, même au prix du sacrifice de leur vie. Rien ne dit que les tueurs de Saint Etienne du Rouvray n’avaient pas au fond d'eux-mêmes horreur   de tuer un prêtre ou un vieillard. Derrière, se trouvent des commanditaires mus par une idéologie : le dessein de tuer est pour ceux-ci le terme d'une chaîne de raisonnement logique, trop logique, dont on connait les prémisses :  il y a une lutte morte entre l'islam et ce qui n’est pas l'islam. Gagneront ceux qui n'auront pas peur de tuer. Choisissons donc les cibles qui auront le maximum de retentissement. S'il y a sans doute de la haine dans cette démarche à caractère idéologique, les prémisses en sont d’abord de mauvaises idées

L'idéologie, c'est deux   choses : d'abord une   vision simplifiée du réel qui pose les prémisses d’un raisonnement fou, mais d'un raisonnement quand même    logique, ensuite la maîtrise d'un pouvoir, pouvoir d'Etat ou pouvoir sur une organisation. Hors du pouvoir, les idéologues ne sont que de doux rêveurs. Au pouvoir, ils sont le plus dangereux des hommes.

Plus que de haine, il faudrait parler de possession, dans la mesure où ceux qui entrent dans la logique idéologique, généralement terroriste, sont tenus par cette chaine de raisons à laquelle ils ne trouvent pas d’échappatoire.  Prisonniers d'une certaine conception du monde, ils n’y voient généralement pas d'alternative sauf à changer complètement leur vision, à se convertir ou reconvertir.

 

Rien d'incompréhensible

 

Il est dès lors absurde de dire que le terrorisme est "incompréhensible". Le mécanisme idéologique tel que nous venons de le décrire n'est pas nouveau: à l’œuvre depuis longtemps, il explique en grande partie les crimes qui ont eu lieu dans les régimes totalitaires du XXe siècle lesquels dépassent largement ceux du terrorisme : 40 millions de victimes en Union soviétique, 80 millions en Chine, 50 pour l'Allemagne nazie (en incluant la guerre qu’elle a provoqué) etc.

Dans tous les cas, il est faux d'imaginer que ces crimes ont été commis par des assassins mus par une haine exacerbée, comme le serait celle d’un mari jaloux ou d’un homme voulant se venger d'une offense.    Ce genre de haine reste, elle aussi, dans l’ordre de la nature. Le crime idéologique est, lui, le produit d'une mécanique froide dont il n'est pas exclu que chacun des maillons déteste ce qu'il fait. Il y a des crimes individuels qui partent des tripes. Les grands crimes historiques, eux, partent d’abord d’idées folles.  Haine ou racisme au départ, certes, mais que le mécanisme idéologique élève à la puissance x.   

Comment ont germé ces idées folles, est une autre histoire.  Mais n'oublions pas que le plus grand des péchés est l'orgueil, qui peut échauffer l'esprit hors de toute mesure.

La société ne survivra pas s’il n'y a pas des hommes et des femmes lucides, gardant en toutes circonstances une froide capacité d'analyse, pour      tenter de maitriser l'irrationalité apparente des évènements.  La première chose que nous devons aux victimes de ces crimes atroces (pour le coup l'épithète est justifiée mais elle ne prétend à aucune fonction explicative) est de comprendre, pas pour être "compréhensif " naturellement, mais comprendre pour combatte, combattre pour mettre un terme à ce qui s’apparente à une grave maladie intellectuelle peut-être propre à la modernité.

 

                                                           Roland HUREAUX

 

 

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 06:29

ANGELA MERKEL EST-ELLE RESPECTABLE ?

 

http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/Angela-Merkel-est-elle-respectable

 

Avant qu’Angela Merkel n’essuie une défaite retentissante au élections allemandes de dimanche dernier - ce qui ne l’empêchera sans doute pas de continuer à gouverner -, la bienpensance internationale ne tarissait pas d’éloges pour elle : Obama, Macron et même le Pape François qui lui envoie des compliments   dans son dernier livre pour avoir accueilli un million de migrants. Il avait même été question un moment de lui décerner le Prix Nobel de la Paix.

Certains émettent il est vrai  quelques réserves sur l’opportunité politique de cette admission qui a multiplié les troubles à l’ordre public en Allemagne (alors que le premier devoir d’Etat de la chancelière est de les empêcher), développé des réactions de rejet et, aux dernières élections,  fait entrer Alternative fur Deutschland au Bundestag : nous  ne  le tenons nullement  pour un parti néo-nazi comme le dit une certaine  presse, mais cette entrée en scène n’était sûrement pas le  souhait de la chancelière.

Et ce n’est pas fini : si ce parti n’a obtenu que 13 % de voix, qui sait ce qu’il en sera dans le futur ? La forte minorité musulmane verra son  poids   croître du fait de l’énorme différentiel de fécondité entre autochtones  et immigrés.   Même si les frontières allemandes sont fermées, l’exaspération va monter ; elle pourrait faire advenir au pouvoir un vrai parti d’extrême droite. Nous   connaissons le tempérament bipolaire de nos amis d’outre-Rhin. La constitution de la République de Weimar passait pour la plus démocratique du monde, sa société pour le plus ouverte d’Europe, on connait la suite. Pour toutes ces raisons, certains trouveront la politique d’ouverture d’Angel Merkel quelque peu légère, voire irresponsable.

 

La responsabilité de Merkel dans la guerre de Syrie

 

Mais ce n’est pas de ce point de vue que nous nous plaçons. Au fur et à mesure que les événements de 2015-2016 s’éloignent de nous, nous percevons mieux ce qui s’est passé.

Qui dit refugiés, dit guerre. Nous parlons   de l’horrible guerre de Syrie qui a fait près de 300 000 morts et déplacé la moitié de la population du pays. Or il est notoire   que la Stiftung Wissenschaft und Politik (SWP),  le plus puissant think tank européen, a  participé dès 2005  à la préparation de la guerre contre la Syrie.   Les Allemands  étaient en particulier chargés de développer les contacts avec les islamistes anti-Assad, proches des Frères musulmans syriens dont le siège  est à Aix-la-Chapelle.  Les militaires allemands ne semblent certes pas être intervenus sur le terrain comme les Américains, les Britanniques  et  les Français l’ont fait en envoyant des forces spéciales et en   bombardant,  mais ils ont joué un rôle important dans la formation de miliciens   djihadistes (prétendus démocrates) destinée à déstabiliser le régime du président Assad. Ces formations ont été dispensées  en Turquie, facilitées par les relations anciennes entre Berlin et Ankara.  L’Allemagne a aussi fourni des armes à la rébellion.

Tout cela s’est  certes fait dans le cadre de l’OTAN qui avait distribué les rôles, mais sour le contrôle d’Angela Merkel qui ne pouvait ignorer la responsabilité de son pays dans le déclenchement de la guerre de Syrie.

Continuons : dès lors que les réfugiés ont afflué sur les côtes d’Asie mineure , voulant  pour la  plupart gagner l‘Allemagne, de deux  choses l’une : ou bien  l’Allemagne ne voulait pas les accueillir et il était facile de  demander à Erdogan de les retenir, d’autant qu’il a  reçu 4 milliards de Bruxelles pour cela  ( voire de ne pas les faire venir car ce sont ses services qui , avec la mafia locale,  sont allés les chercher) ; si  l’Allemagne voulait les accueillir et c’est  ce qu’a dit  Mme Merkel  à l’été 2015 ,  alors , il était très facile d’affréter   des charters  à partir d’Ankara et  d’ Istamboul qui ne leur auraient rien ou très  peu coûté  ( prix d’un vol  aller et retour Istamboul-Berlin  : 170 €). Au lieu de cela, on a laissé ces malheureux se saigner aux quatre  veines pour payer les 4000  ou 5000 euros que réclamaient les passeurs, on les a laissé traverser la mer Egée sur des embarcations de fortune et on les a obligés à remonter à pied la péninsule balkanique dans les conditions les plus sordides.  Quelque part Mme Merkel e responsable de la mort du petit Aylan qui avait fait  la une des médias.

Que cette grande humaniste ait obligé les réfugiés à passer par les réseaux mafieux peut s’expliquer de plusieurs manières : a-t-elle été obligée de ménager la mafia turque, très influente dans la communauté turque d’Allemagne ? A tout le moins a-t-elle du ménager son ami Erdogan[1] qui  est proche de cette mafia. Elle a pu aussi penser que la sélection par l’argent     amènerait en Allemagne une main d’œuvre plus éduquée, main d’œuvre que les pays en cause avaient  pris le soin de former  pendant plusieurs années. Tout cela au seul bénéfice de l’industrie allemande ?

 

Roland HUREAUX

Novembre 2017

 

[1] Depuis le coup d’Etat de juillet 2016, les relations  entre Merkel et Erdogan se sont  refroidies.

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 06:28

 

UN MONDE NOUVEAU

 

http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/Nous-entrons-dans-un-monde-nouveau3

 

http://www.magistro.fr/index.php/template/lorem-ipsum/de-par-le-monde/item/2939-nous-entrons-dans-un-monde-nouveau

 

Quand l'ambassadeur de France à Washington, dépité, tweete après l'élection de Donald Trump : « un monde s'effondre devant nos yeux », c'est "la fin d'une époque, celle du néolibéralisme", il contrevient certes aux usages diplomatiques, mais il dit la vérité.

Un monde nouveau était né en 1945, qui devait devenir bientôt celui de la guerre froide : une confrontation idéologique sur fond de menace nucléaire ;   les États-Unis et l'URSS ont su heureusement éviter un affrontement majeur.

Le monde a connu un premier grand changement avec la fin du communisme en 1990.

Il vient d'en connaître un second.

Ivres de leur victoire sur le marxisme, les cercles dirigeants américains ont, après la chute du rideau de fer, rêvé de la « fin de l’histoire » par le triomphe univesel de la ddémocratie libérale et du libéralisme économique. C'est là l’émergence de l'école néo-conservatrice (qu'on peut aussi bien appeler néo-libérale) une idéologie qui se joue du clivage gauche-droite :   elle a inspiré autant l’action d'un démocrate comme Bill Clinton (et surtout d ‘Hillary Clinton entièrement acquise à cette idéologie) que d’un républicain comme George Bush fils et, à un moindre degré, de Barack Obama. Elle s'impose de fait aux classes dirigeantes européennes, avec l’appui des médias dont l'unanimité (le "politiquement correct ») n’est pas sans rappeler celle des régimes totalitaires.

Partisans de la démocratie libérale, du libre-échange, y compris des capitaux, les néoconservateurs en vue vont plus loin : ils préconisent aussi la libre circulation des hommes, au point d'encourger les migrations et la disparition à terme des États au bénéfice d'une gouvernance mondiale.  Ils prônent non seulement la liberté politique mais le libertarisme dont le symbole est le mariage homosexuel, aujourd'hui imposé de force aux pays du Tiers monde par un chantage aux subventions.  

Les résistances des peuples à ce monde nouveau sont diabolisées coMme du "populisme". L'Union européenne, selon le vœu de Jean Monnet lui-même, est conçue de plus en plus comme le banc d'essai de ce monde nouveau.

Beaucoup de néoconservateurs   considèrent que ce modèle doit s'imposer par la force, à tout le moins par des actions de dstabilisation délibérées contre tout ce qui lui résiste, au besoin en violation du droit international. Ces actions de déstabilisation sont accompagnées d'une propagande planétaire destinée à diaboliser le récalctirant en l'accusant des pires crimes.  La première victime fut , en 1999,  le président de la Yougoslavie ,  Slobodan Milosevic  , dont le Tribunal prénal international vient pourtant de reconnaître  qu'il n' avait aucune charge contre lui… mais il est  mort  en prison entretemps . Après dix ans de chaos où elle ne semblait menacer personne (période Eltsine : 1990-1999), la Russie est remise en ordre et se relève avec Vladimir Poutine à partir de 2000 autour d'un Etat fort et du retour aux valeurs traditionnelles que combattait le communisme, en premier lieu le christianisme orthodoxe.  Elle est à son tour diabolisée. Les « révolutions orange » fomentées par l’Occident (Géorgie, Ukraine) visaient à   encercler la Russie d’États hostiles selon le plan décrit par le géopoliticien américain Bigne Brezinski[1]. La dernière est celle de la place Maïan en Ukraine que Valéry Giscard d'Estaing qualifie de "coup d'état de la CIA " et qui a entraîné la guerre d'Ukraine.

L'attentat  du 11 septembre 2001 avait donné un motif aux États-Unis pour appliquer  la  politique de démocratisation par la force (régime change) au Proche-Orient : invasion de l'AfghanIstvan, puis de l'Irak. A partir de 2011, les printemps arabes (qui s’en prenaient à des régimes souvent impopulaires mais aussi excitées de l'extérieur) entrainèrent le renversement des gouvernements en Tunisie, en Égypte et au Yémen. Non au bénéfice de vrais ddémocrates mais des islamistes. Cela n'était pas pour déplaire aux Etats-Unis, qui, depuis le pacte passé en 1945 entre le président Roosevelt et le roi d'Arabiee Ibn Séoud[2], avaient toujours favorisé les islamistes dans le monde musulman pour y faire pièce à l’influence du communisme athée. Cette alliance a été reprise contre la Russie chrétienne.

Des dictateurs qui résistèrent aux printemps arabes, et, de fait, à l'islamisme, le premier fut renversé par une intervention occidentale : Kadhafi en Libye, le second, Assad en Syrie fit l'objet d'une déstabilisation totale de son pays :  la Russie et la Chine qui n'avaient approuvé que du bout des lèvres à l’ONU l’intervention occidentale en Libye, mirent leur véto à celle qui était projetée en Syrie. Néanmoins une coalition composée des pays d'OTAN, des monarchies pétrolières arabes et de la Turquie apporta un soutien militaire et financier aux djihadistes qui voulaient renverser le régime d'Assad. Les chrétiens d'Orient ont été les premières victimes, mais pas les seules, de leur action. Trump a reconnu lui-même que Daech était une création des États-Unis.

Sur un autre registre, le TAFTA (traité de libre-échange transatlantique), répond à l’idéal d'un monde commercialement unifié où les États eux-mêmes seraient passibles de tribunaux en principe indépendants.

Alors qu’au temps de la guerre froide, les États-Unis avaient été toujours sur la défensive face à l’idéologie communiste (Corée, Vietnam, Afghanistan), ils se sont trouvés, devenus idéologues à leur tour, presque partout en position offensive depuis 1990.   

Au total la politique néoconservatrice est responsable de la guerre civile dans au moins six pays :  Afghanistan, Irak, Libye, Syrie, Yémen, Ukraine. Les vagues de migrants et l'extension du terrorisme en Europe occidentale en sont la conséquence directe ou indirecte.

Cette politique avait eu des résultats aussi désastreux au Rwanda et dans certains autres pays d'Afrique noire.

Les États-Unis ne pouvaient cependant prétendre étendre leur modèle à des mastodontes comme la Chine ou le Pakistan, sachant que l'Inde pouvait être tenue pour un pays démocratique et le Japon, entièrement inféodé aux États-Unis, aussi. Toujours communiste en théorie, capitaliste en fait et fort peu démocratique, la Chine, au nom d’un idéal de libre-échange généralisé, fut admise à l’OMC [3] en 2000 : trichant alors avec les règles non écrites du marché mondial, elle en profita pour déstabiliser les économies occidentales grâce à une monnaie largement sous-évaluée qui lui a permis de vendre ses produits très bon marché.  Ses excédents gigantesques sont le revers des déficits tout aussi gigantesques des Etats-Unis et, en partie, de la désindustrialisation de l'Europe. L'attitude peu amène des Américains, dont les bases surveillent de près son environnement immédiat, a amené la Chine à se rapprocher   de la Russie, alors même que leur commune adhésion au communisme les avait jadis opposées

La politique américaine des 25 dernières années s'est appuyée sur des dizaines  d'institutions  tendant à répandre la doctrine néoconservatrice : think tanks richement dotés par les grandes banques ou les grandes entreprises, forums internationaux  (Davos, Bilderberg),  Trilatérale, CFN,   et  aussi des initiatives personnelles  comme celle du milliardaire George Soros , qui finance la Foundation for an open society , dont les objectifs (chute de Poutine, révolutions oranges, soutien aux femens, promotion de la LGBT et de l'avortement, encouragement aux migrations, etc.) correspondent à peu près à ceux  des néoconservateurs,  ou encore de Bill Gates, plus orienté, lui,  vers la lutte contre le réchauffement climatique et le contrôle des naissances ( il veut réduire la population de la planète des 9/10e sans dire cependant  qui il gardera ). L'Union européenne et presque tous les Etats  qui la composent  se sont peu à peu inféodés à Washington  , comme le montre l'exemple des sanctions imposées à la Russie,  destructrices pour l’agriculture française. Depuis le refus de Jacques Chirac de s’engager dans la guerre d'Irak que les Américains avaient presque tenu pour un crime, aucun gouvernement d'Europe occidentale n'a osé résister à la politique néoconservatrice.

Dans cette configuration, l'Église catholique est tenue en suspicion. Alliée choyée contre le communisme jusqu’en 1990, elle est aujourd'hui ressentie par une partie des forces dominantes de la planète comme un lieu de résistance à l'ordre nouveau, en particulier par ses positions sociétales :  opposition à l'avortement, défense de la famille, mais aussi sociales :  la doctrine sociale de l'Eglise n'est pas l'ultralibéralisme.  Des révélations récentes de Wikileaks ont mis à jour des courriels de Sors où il déclare vouloir subventionner certaines tendances de l'Église catholique pour la faire évoluer et la diviser.  Il n’est pas exclu que certains gestes du pape François qui ont désorienté beaucoup de catholiques mais plu aux médias,  soient inspirés par le souci de se protéger de ces tentatives de déstabilisation.  Très discret sur la politique occidentale au Proche-Orient que les chrétiens jugent cependant responsable de leurs malheurs, il a signé à La Havane une audacieuse déclaration commune avec le patriarche Cyrille de Moscou (12 février 2016) qui laisse espérer un rapprochement avec l’orthodoxie.

La pointe extrême du néo-conservatisme se trouvait dans les projets d'Hillary Clinton : pousser la Russie dans ses retranchements, y compris par la menace d'une guerre nucléaire "limitée", pour l'affaiblir définitivement, intervenir massivement en Syrie pour empêcher la défaite des djihadistes.

 

L'échec du néo-conservatisme  

 

Pourquoi donc cette immense mécanique s'est-elle grippée ?

D'abord par la résistance de la Russie. Dirigée par un chef exceptionnel, Vladimir Poutine, elle a su déjouer les tentatives de déstabilisation, quitte à exercer des représailles comme l'annexion de la Crimée. Elle a aussitôt mis un terme à la série des « changements de régime » voulus  par Washington en défendant avec tous ses les moyens le gouvernement Assad en Syrie. Malgré les turpitudes dont on l'accuse[4], ce gouvernement demeure  le seul légitime en droit international, ce qui fait que  l'intervention russe, faite à sa demande, est légale, alors que  les actions de soutien aux djihadistes menées par les Occidentaux  depuis 2011 (dont celles des Français,  pourtant confrontés au terrorisme chez eux) sont  illégales.   

La  Russie et les États-Unis jouent en quelque sorte à front renversé puisque désormais la Russie n'a aucune idéologie à répandre . Elle se contente de défendre son intérêt national - conçu il est vrai largement,  comme il sied à  une grande puissance. Les Etats-Unis ont depuis 1990 la volonté d'étendre leur modèle ( ou celui de leurs alliés comme les islamistes ) au monde entier.

La Turquie, dirigée par un islamiste, Erdogan, un moment candidate à l'entrée dans l’Union européenne et alliée de l'Occident en Syrie, a jeté le masque après  la récente tentative de coup d’État, qui l'a conduite à  afficher ouvertement son despotisme et  à  se rapprocher de la Russie,  laquelle ne se mêle pas de son régime intérieur.

Le néo-libéralisme s'est surtout heurté au réveil des peuples, vilipendé sous le nom de "populisme". Loin d'être un idéal à attendre, le monde tel que l’ambitionnaient les libéraux est apparu  à  ces peuples ,  en Europe et aussi  aux États-Unis,  comme un  symbole de  délocalisations, d'immigration massive, de chômage , d'inégalités croissantes,   à quoi s’ajoutaient d’autres effets plus ou moins liés à la même idéologie :  atomisation de la société, perte des repères (nationaux, familiaux, en France communaux, de genre, déclin de l'enseignement), désespérance de l'individu écrasé par une machine mondiale sur laquelle il  n'a aucune prise.  

Certains modèles économiques (Bairoch, Todd) voient , au rebours de la pensée dominante, dans la libéralisation des échanges, une cause de la stagnation économique et du chômage, par disparition du moteur étatique de relance, dit keynésien, qui n'est efficace qu'à l'intérieur d'un espace protégé. Les idées protectionnistes reviennent à l'ordre du jour.

Les résistances à la pensée  dominante  se sont aussi exprimées  en Europe : en Pologne, en Hongrie et surtout au Royaume-Uni (Brexit) et en Italie (dernier référendumm qui exprimait en fait un refus de l'Europe de Bruxelles).

Mais la grande révolution est venue de l'élection de Donald  Trump, le 7 novembre 2016  contre son propre parti et contre  la totalité de l'establishment politique, médiatique, bancaire , des deux côtés de l’Atlantique.

Malgré une démagogie grossière, le nouveau président a une pensée en matière de politique étrangère  pas très différente de celle de Poutine ( ou autrefois de Nixon) : les États-Unis doivent être   forts,   mais pas pour répandre leur idéologie ou changer les régimes , pour défendre sans concession leurs intérêts . Il n'exclut pas un certain retour au protectionnisme, refuse  le TAFTA  et veut dialoguer  avec Poutine. Sa priorité n’est plus l'affrontement avec la Russie,  mais la défaite de l’islamisme. D'une alliance Etats-Unis - Islamistes contre la Russie, on pourrait passer à une alliance Etats-Unis -Russie contre l'islamisme. Rien  ne devrait changer pour autant   dans l'appui américain à Israël.

Trump s'est montré en revanche plus offensif  avec la Chine. Le rétablissement de la balance commerciale  américaine, nécessaire à l'assainissement de l'économie mondiale, passera sans doute par une épreuve de force avec la Chine, sinon militaire, du moins monétaire. 

Il est difficile de dire si Trump tiendra ses promesses de non-intervention. Il reste que, souhaitant renforcer la puissance de l’Amérique, il ne sera   un interlocuteur facile pour personne.

Que deviendra dans ce monde nouveau l'Europe de Bruxelles, déjà en situation de crise profonde, en particulier sur le plan monétaire ?  Il y a peu   de chances  qu’elle échappe  à un retour du fait  national,   qui n'est pas nécessairement à craindre.  Jean-Paul II disait que la cause des guerres n'était pas les  nations  mais la violation des droits des nations[5].  Si Trump leur donne le feu vert,  les pays d'Europe auront  de meilleures relations  avec  la Russie, ce qui  est une bonne nouvelle.  Trouveront-ils  pour autant,  habitués qu'ils sont depuis longtemps à la soumission ,  des hommes d'Etat à  même de peser entre Trump et Poutine ?   Peut-être.

Ce  ne sont pas les nations  mais les idéologies qui sont facteurs de guerre. Le néo-conservatisme libéral libertaire qui a mis à feu et à sang une partie de la planète vient de le démontrer. Pour la première fois depuis 1945, le monde est dominé par deux puissances n'ayant pas la prétention d'exporter un modèle idéologique. C'est de  bon  augure pour la paix.

 

                                                           Roland HUREAUX

                                                           Novembre 2017

 

 

 

 

[1] Zbigniew Brzeziński, Le grand échiquier, 1977.

[2] Dit pacte de Quincy car il fut scellé sur le croiseur Quincy au large de l'Arabie

[3] Organisation mondiale du commerce

[4] Souvent sans fondement : ainsi, il fait peu de doutes que l'attaque aux armes chimiques de la Ghouta (21 août 2013) a été une provocation des djihadistes pour susciter l’intervention américaine (cf. Rapport du Massachussetts Institute of Technology).

[5] Discours pour le 50e anniversaire de la fin de la 2de guerre mondiale, 8 mai 1995.

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 06:25

EN MARCHE VERS NULLE PART

 

Pourquoi Macron ne résoudra pas les problèmes de la France

 

Liberté politique, N°76, Février 2018

 

Comment ne pas être frappé du contraste entre les dithyrambes dont beaucoup d’observateurs ont couvert l’arrivée au pouvoir de Macron et de sa nouvelle majorité, qualifiés d’événement historique, de rupture majeure dans l’histoire de France, comparée même à 1789, avec le caractère insipide du long discours que le nouveau président a infligé aux chambres réunies en Congrès à Versailles, le 3 juillet dernier ?   Le discours de politique générale d’Edouard Philippe, nouveau premier ministre, devant l’Assemblé nationale le lendemain, quoique plus précis, était à l’avenant, dans la ligne du programme électoral de Macron.

Sans vouloir faire injure à quiconque, le discours du président faisait penser à une déclaration de la Conférence des évêques de France :  beaucoup de bons sentiments, rien que du politiquement correct et pas un mot qui tranche avec la langue de bois habituelle dans nos milieux dirigeants, n’oubliant ni le numérique, ni les handicapés[1].

Nos évêques n’auraient cependant pas fait preuve de ce cynisme froid qui inspire, entre autres, les projets de réforme de la justice. Macron    invoque haut et fort la transparence : quelle ironie de la part de quelqu’un qui n’a jamais fait la lumière sur ses opacités financières et dont le premier ministre, alors député, avait refusé, en violation de la loi, de déclarer   son patrimoine à la Haute-autorité pour la transparence de la vie publique ! 

Propos encore plus étonnant : « J’appelle à la retenue, à en finir avec cette recherche incessante du scandale, avec le viol permanent de la présomption d’innocence, avec cette chasse à l’homme où parfois les réputations sont détruites, et où la reconnaissance de l’innocence, des mois, des années plus tard, ne fait pas le dixième du bruit qu’avait fait la mise en accusation initiale. Cette frénésie est indigne de nous et des principes de la République. » Le président veut aussi « assurer l’indépendance pleine et entière de la justice » ; « Je souhaite que nous accomplissions enfin cette séparation de l’exécutif et du judiciaire en renforçant le rôle du Conseil supérieur de la magistrature, et en limitant l’intervention de l’exécutif dans les nominations des magistrats du parquet. »

Macron aurait-il déjà oublié qu’il n’a été élu qu’en éliminant son principal concurrent Fillon par une interférence caractérisée de la justice dans le processus électoral, dont il est sans doute, avec ses amis, le principal instigateur, en tous les cas le principal bénéficiaire, provenant elle-même d’une ingérence du pouvoir exécutif au travers du parquet financier, cela en contradiction avec les principes les plus sacrés de la République[2].  L’affaire Fillon a été en outre démesurément grossie par une presse qui ne chasse plus qu’en meute au mépris du pluralisme nécessaire à la démocratie.  Si les grands principes proclamés par Macron à Versailles avaient été appliqués un an plus tôt, il n’aurait probablement pas été élu. 

Mais laissons cela : après tout, il y a toujours eu de l’hypocrisie en tout pouvoir ; on passe   dessus quand elle accompagne un grand dessein.

Hélas, quand Macron parle d’une « transformation résolue et profonde, tranchant avec les années immobiles ou avec les années agitées », on cherche le    commencement de ce que pourrait être cette transformation.  « Nos concitoyens ont fait le choix d’un pays qui se remette en marche. » 

En marche vers quoi ?  C’est toute la question.

Il invoque la « cause de l’homme », le « progressisme » et, très étonnant de la part de celui qui est apparu comme le champion des forces nationales ou internationales les plus désireuses de dépasser le cadre hexagonal, « la souveraineté de la nation » (il évite l’adjectif nationale !), définie comme le fait de « pouvoir disposer de soi-même, malgré les contraintes et les dérèglements du monde ».

 

Des propositions institutionnelles hors de propos

 

Les seules propositions que fait Macron dans son discours de politique générale sont d’ordre institutionnel, comme si celles-là seules étaient à son niveau : beaucoup doutent cependant que les problèmes les plus graves de la France d’aujourd’hui aient un caractère   institutionnel. Il est ainsi prévu de réduire le nombre de parlementaires : qui peut croire qu’il y a là un enjeu essentiel ?  Est-ce pour faire de économies ? Non, puisque chacun aura plus de moyens.

Cette proposition est d’ailleurs fort peu en cohérence avec une affirmation ultérieure : « En faisant progressivement du mandat électif un statut, nous avons effacé ce qui en est la nature profonde : le lien avec le citoyen. »  Avec plus de moyens, le caractère statutaire du parlementaire ne sera-t-il pas renforcé ? Avec un député pour   200 000 habitants au lieu d’un pour 100 000, le rapprochera-t-on du citoyen ? Surtout s’il n’a plus aucun mandat local, ni enveloppe pour aider les communes.  La France qui a 577 députés trouve que c’est trop. L’Allemagne qui en a 709 ne le trouve pas. Le parlementarisme est visiblement plus fatigué  de ce côté-ci du Rhin [3].

Pour le reste, qui ne serait d’accord avec la formule « Sachons mettre un terme à la prolifération législative », mais il n’est pas premier à le dire.

Toujours en matière de justice, la suppression projetée de la Cour de justice de la République, irait à l’encontre d’une vieille tradition républicaine, sans faire avancer quoi que ce soit. Le chef de l’Etat, restant, lui, irresponsable et inviolable, sera désormais le seul à bénéficier d’un régime d’exception : Macroprésident ! La réduction à dix du nombre de collaborateurs des cabinets ministériels va dans le même sens.  Loin d’être révolutionnaires, ces mesures, comme toutes celles qui se trouvent ans le projet de loi « rétablissant la confiance dans l’action publique », sont proposées par les uns et par les autres depuis trente ans. Gageons que loin de rétablir la confiance, elles  auront l’effet inverse , ne serait-ce que parce qu’ elles   confortent  l’opinion dans l’idée fort peu républicaine que le monde politique est un lieu d’abus , alors que le vrai problème est ailleurs : c’est   le contenu des politiques menées, la réduction au fil des ans des   pouvoirs des assemblées, au bénéfice de Bruxelles mais aussi de multiples instances juridictionnelles,   qui font que , comme la noblesse à la fin de l’Ancien  régime, les élus nationaux donnent le sentiment  de ne plus servir  à rien.  Par cette loi démagogique, qui jette leur tête au peuple, on leur demande de consentir à leur propre abaissement et même de l’aggraver.     

En matière d’institutions locales, sujet abordé de manière très vague, le sentier battu se fait boulevard ;   est invoqué un autre poncif :  la dénonciation du centralisme : « La centralisation jacobine traduit trop souvent la peur élémentaire de perdre une part de son pouvoir. Conjurons cette peur. Osons expérimenter et déconcentrer, c’est indispensable pour les territoires ruraux comme pour les quartiers difficiles. Osons conclure avec nos territoires de vrais pactes girondins, fondés sur la confiance et sur la responsabilité. Nombre de nos territoires l’attendent. » Mais que fait-on d’autre depuis quarante ans ?  Macron ignore-il que la France est devenue un des pays les plus décentralisés d’Europe[4] ? Même quand Raffarin en avait fait, faute d’autre, la grande idée de son gouvernement, la décentralisation, venant immédiatement après le 21 avril 2002, apparaissait déjà dépassée et en tous cas très peu à la mesure des démons que l’on voulait exorciser. 

Sur ce chapitre, le premier ministre va à peine plus loin dans le détail : il propose seulement d’encourager les « communes nouvelles », dispositif destiné à forcer la réduction (bien inutile, généralement coûteuse et, au fond, inhumaine ) du nombre de communes et évoque le regroupement des départements. Il est question de réunir une conférence des territoires, gadget assez symptomatique de ceux qui n’ont pas d’idées : « je ne sais pas quoi faire, concertons-nous ». Comme en matière agricole.

Philippe dénonce aussi la supposée inertie des collectivités locales : « Les jardins à la française ont leur charme mais ils se prêtent assez peu au foisonnement d'initiatives dont le pays a besoin et auxquels les collectivités sont prêtes. Comme l'a réaffirmé le président de la République hier, nous voulons donner aux libertés locales toutes leurs forces. »  On ne sait visiblement pas en haut lieu que nos collectivités ne sont pas avares de projets    coûteux, bien au contraire, et qu’il ne faut pas chercher ailleurs la source   de ces centaines de milliers de fonctionnaires que nous avons en trop.

Seule bonne idée sur ce chapitre : « Pourquoi ne pas permettre non plus sur la base du volontariat à certaines collectivités d'exercer des compétences pour le compte d'un autre niveau comme par délégation. » Que n’a-t-on pas pensé plus tôt à cette mesure technique ?

Autre poncif assez éculé : « Nous devons substituer à l’idée d’aide sociale, à la charité publique, aux dispositifs parcellaires, une vraie politique de l’inclusion de tous. »   Lao Tseu ne disait-il pas : « Si tu donnes un poisson à un homme, il mangera un jour. Si tu lui apprends à pêcher, il mangera toujours » ?    C’était déjà la grande idée du RMI devenu RSA[5] spécialement à cet effet et de la plupart des politiques sociales instaurées depuis trente ans.  Nihil novo subi sole ! Au lieu de ressasser toujours les mêmes bonnes intentions, ne vaudrait-il pas mieux chercher à comprendre pourquoi les politiques qui s’en inspiraient ont échoué et nous dire en quoi on fera mieux cette fois ? Mais le nouveau président est sans doute trop au-dessus des contingences  pour s’interroger sur ce genre de sujet ! 

 

[1] Les déclarations de Macron et Philippe n’ont même pas   l’excuse d’être un document collectif où les angles sont nécessairement arrondis.

[2] L’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen dispose que « toute société dans laquelle la séparation des pouvoirs (n’est pas) déterminée, n'a point de Constitution. ». L’article 13 du titre II de la loi des 16 et 24 août 1790, toujours en vigueur, dispose que : « Les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler de quelque manière que ce soit les opérations des corps administratif », interdit repris par la loi du 16 fructidor an III 

La loi du 31 mars 1914 (article 110 du Code électoral) interdit la poursuite pour fait de corruption de candidats en campagne.

La loi no 82-213 du 2 mars 1982 interdit aux Chambres régionales de comptes de rendre publiques les conclusions de leurs enquêtes   dans les six mois précédant une élection.

 

 

[3] Que le Tribunal constitutionnel de Karlsruhe ait récusé, à   la différence des juridictions françaises, la supériorité absolue du droit européen témoigne aussi du maintien d’un plus vif sentiment démocratique en Allemagne : étonnant renversement de l’histoire !  

[4] « La France apparaît comme le pays le plus décentralisé d’Europe, celui où le contrôle administratif est le plus faible, où la marge de manœuvre en matière d’acquisition et d’utilisation de ressources financières est la plus large et celui où les élus ont la plus grande liberté pour exercer les compétences locales » (Jacques Ziller, 1996)  

 

[5] RMI : Revenu minimum d’insertion ; RSA : revenu de solidarité active

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 06:04

Une économie précontrainte, une réforme du marché du travail encore imprécise  

 

Mais le problème principal, celui sur lequel tous les gouvernements sont attendus depuis plus de vingt ans, c’est le chômage. Il n’en est que peu question dans les deux discours inauguraux.

Depuis lors, les premières annonces relatives à l‘Ordonnance travail qui viennent d’être rendues publiques pourraient éclairer notre lanterne. L’ ordonnance s’inscrit dans la ligne des lois Macron et El Khomri, celle d’une politique de l’offre visant à accroître la flexibilité du travail et éventuellement à en limiter le coût. Il semble que ce soit    la seule réforme qui importe vraiment aux   mentors     qui ont soutenu Macron dans sa campagne   et celle qu’avant toute autre, attend Bruxelles.   Elle contient certes une bonne mesure : le plafonnement des  indemnités que les conseils de prudhommes pourront verser  en cas de licenciements   abusif ( que n’y a-t-on pensé plus tôt) .  Mais sur des points essentiels, comme le devenir les 35 heures, on reste encore dans l’incertitude.  Pas de quoi fouetter un chat !

Le bon accueil fait à cette annonce pose une question : les réformes ne sont-elles pas affaire, elles aussi, de communication. Echappent-elles vraiment  à la logique de la « société de spectacle »  ? Une bonne réforme ne serait pas une réforme qui va au fond des choses mais une réforme menée  par quelqu’un qui maitrise assez  les réseaux et les techniques de  communication pour faire croire qu’elle est bonne. Y compris vis-à-vis d’interlocuteurs  plus crédules qu’on ne croit comme le Medef ou  la commission de Bruxelles.

Emmanuel Macron l’a dit et redit : il ne met pas en doute l’Europe et l’euro. Bien au contraire, il se propose de « tout faire pour réconcilier les Français avec l’Union européenne » :  vaste programme !  Il manœuvre donc en matière économique dans le cadre précontraint de ses deux prédécesseurs, Sarkozy et Hollande, c ’est à dire avec une monnaie lourdement surévaluée   - par rapport aux coûts   français - qui rend les prix français peu compétitifs et qui fait que la généreuse création monétaire de la Banque centrale européenne (dite quantitative easing) profite peu à la France.  Le résultat : un chômage en augmentation, un déficit grandissant   de la balance commerciale, un peu partout des fermetures d’usines ou la disparition de de fermes.  Autant dire que   le quinquennat Macron sera la continuation du quinquennat Hollande. Comme le dit Emmanuel Todd :  « Réformer, flexibiliser, accepter la gestion allemande de la monnaie… une direction qui amène inévitablement à un ou deux points de chômage supplémentaires en fin de quinquennat. Pour Macron, poursuivre dans cette voie, c’est accepter de disparaître politiquement à  40 ans. Une hollandisation éclair. »[1]  Malgré le ballon d’oxygène provisoire de la  reprise mondiale, c’est cela, n’en doutons pas,  qui attend le nouveau président.

Beaucoup d’experts, et des plus sérieux[2], pensent que la seule solution est la sortie de l’euro – de la France… ou de l’Allemagne.  Faute de l’envisager, Macron est condamné à continuer la politique à la petite semaine de Hollande, à laquelle il a été très étroitement associé : contrôler – mal -  les déficits publics, principalement par des hausses d’impôts touchant les classes moyennes, se désoler de  la mollesse du taux de croissance, toujours en-deçà des prévisions, assister passivement au lent décrochage de l’économie française en ressassant qu’elle se relèvera demain.

L’autre solution pourrait être une action déterminée sur les coûts, par l’instauration de la TVA sociale par exemple, mais on n’en prend   pas le chemin puisque le nouveau gouvernement préfère financer les déficits publics par la CSG, non remboursable aux exportateurs, que par la TVA qui, elle, l’est.   Il reste ce que préconisent tous les think tanks ultralibéraux :    une dérégulation drastique du marché du   travail avec baisse des salaires, assortie de celle des dépenses publiques, en particulier sociales, soit la politique de l’offre telle qu’elle est imposée par le Commission européenne aux pays méditerranéens ; Macron voudrait aller  dans ce sens mais de manière beaucoup trop molle pour que cela ait de l’effet. Malgré une large majorité qui lui donne apparemment les mains libres, il n’est pas sûr qu’il ait assez de    légitimité pour passer en force sur ce chapitre. Aucune coupe sérieuse n’est ainsi envisagée dans les dépenses publiques (hors celles que nous avons indiquées).  Et même si une politique énergique de cette sorte était engagée, le résultat n’en serait nullement assuré, les mesures d’austérité ayant eu presque partout un effet récessif.  

En marche à beau apparaître comme le parti des « start-up », supposé moderne et ouvert aux idées nouvelles, les logiques macroéconomiques finissent toujours par prévaloir.

 

Politiquement correct : vers une démocratie illibérale ?

 

Les Ordonnances réformant le Code du travail     plafonnent les indemnités de licenciement, ce qui est raisonnable,  sauf en cas de violations des libertés , parmi lesquelles les  discriminations. Lesquelles ?   On le devine : les femmes, les homosexuels, les non-Blancs, les musulmans etc. La conséquence immédiate sera que, en cas de licenciement   collectif, les premiers touchés seront ceux qu’Anne Lauvergeon[3] appelait les « mâles blancs ». Au motif de lutter contre la discrimination, on instaure   la discrimination.  

L’effet de cette disposition pourrait ainsi être d’aggraver la division du peuple en communautés et catégories [4]. Loin d’alléger l’atmosphère au nom d’une saine égalité républicaine, elle approfondira les clivages communautaires - et naturellement les rancœurs qui vont avec, dont on devine les conséquences électorales.

Ainsi, cette réforme  prétendue libérale, sur ce sujet au moins, n’est donc pas si libérale qu’on dit. Elle ne fera que développer les frustrations d’une partie de la population. Macron a été   porteur, non seulement d’un parfum de libéralisme mais d’un projet de « politiquement correct » renforcé : ouverture à l’immigration, intégrisme écologique, antiracisme, discrimination positive à   tous les étages etc., ce qui lui a valu la sympathie de la presse et le vote de beaucoup de musulmans. Il se montre ainsi le bon élève de la fondation Terra Nova qui prévoyait la formation d’un nouveau bloc de gauche s’appuyant sur les minorités, raciales, religieuses et sexuelles, comme le parti démocrate américain dans sa version Obama-Clinton.  Macron qui se plait à dénoncer les « démocraties illibérales » laisse craindre, lui aussi, un recul des libertés.

Est-ce au chapitre du communautarisme qu’il faut inscrire le projet d’ouvrir la PMA aux femmes seules ou lesbiennes ?  En partie au moins. 

On peut même craindre le pire : la nouvelle assemblée est, parait-il,   largement renouvelée et plus   diverse. Nous pensons qu’une des raisons pour lesquelles les politiques menées depuis vingt ans suscitent l’ire des français, c’est l’incompétence des décideurs. Que faut-il attendre de la nouvelle présidente de la commission de lois, issue d’En marche  qui demande à son entrée en fonctions « quand seront votés les décrets[5] ? ».

En fait rien ne laisse espérer un commencement de solution aux     problèmes qui ont provoqué le grand ras-le-bol des Français et qui les a amenés à s’imaginer  qu’avec un homme jeune et des équipes nouvelles, un air de modernisme qui semblait de bon aloi, les choses iraient mieux. Il est   tragique de penser que   nos concitoyens , dont un tiers a voté pour le Font national, ce qu’on semble perdre de vue, et qui attendaient une meilleure prise en compte de leurs préoccupations,  vont très vite se trouver     confrontés à une équipe  incompétente qui semble,  sur son  nuage, inconsciente   de la gravité de problèmes qui se posent à eux. Avec un gouvernement qui, loin d’apporter une   solution originale à leurs problèmes,  est entièrement conditionné par les idéologies qui en sont la source, et, de ce fait, ne propose sur à peu près tous les sujets, que la    continuation et l’aggravation des politiques menées depuis trente ans et qui les ont tant exaspérés.

 

La société du spectacle

 

Ainsi pourrait trouver son illustration, la formule de Guy Debord : « Le société du spectacle dans sa phase avancée (…) n’est plus pour l’essentiel réformable. Mais le changement est sa nature même, pour transmuter en pire chaque chose particulière »[6] .En d’autres termes, le spectacle politique a besoin de réformes permanentes mais ces réformes ne peuvent, dans les   domaines particuliers où elles s’appliquent, qu’empirer l’état des choses. 

Ce que Guy Debord appelait la société du spectacle (ne dirions-nous pas de communication ?)   apparaissait à cet auteur marxiste comme le stade suprême du capitalisme, le moment où,  cessant de gérer les choses, il ne gère plus que les représentations. N’est-ce pas ce à quoi nous assistons ?

La campagne de Macron qui ne voulait pas, au début, entendre parler de programme, jusqu’à ce qu’il en produise un, bien léger, sur la fin,  appuyée par les méthodes les plus modernes de communication politique (à côté desquelles les réunions de ses concurrents  paraissaient bien ringardes), fut-elle autre chose qu’un grand spectacle au sens debordien ? Que penser par exemple de ce mot d’ordre : « Pensons printemps, mes amis, pensons printemps ! ».

 

L’idéologie

 

Mais il se pourrait que pour comprendre, dans toute son ampleur l’illusion actuelle, il faille aller plus loin que Debord et faire appel à la notion d’idéologie.

L’idéologie peut être d’abord définie, comme l’ont fait Hannah Arendt ou Jean Baechler[7], comme une politique menée à partir d’une analyse simplifiée du réel (exemples : « la propriété, c’est le vol », il faut donc la supprimer : « les nations, c’est la guerre », il faut donc les abolir ; « l’histoire est tout entière déterminée par les races » ; « la prise en compte des sexes, c’est l’inégalité »). L’idéologie est aussi généralement l’imitation fallacieuse d’une démarche scientifique : ainsi la méthode globale de l’apprentissage de la lecture ou la théorie du genre.

Quoique le temps des grandes idéologies comme le marxisme-léninisme semble dépassé, des idéologies sectorielles ont proliféré dans presque tous les domaines de l’action publique :  économie, culture, éducation, justice, environnement ;  les désigner seulement comme libérales serait réducteur car elles sont loin d’être   cohérentes entre elles [8].

Il reste que, globale comme le communisme ou   sectorielle   comme la méthode globale, l’idéologie se reconnait à ce qu’elle est peu opératoire : elle a produit dans un cas un système économique stérile, dans l’autre la montée de l’illettrisme. Fondée sur la simplification, l’idéologie ne peut épouser la complexité du réel pour aboutir à des solutions opérationnelles.  Non seulement, elle est inefficace mais elle a des effets pervers car elle heurte une réalité à laquelle elle n’est pas adaptée. L’idéologie porte avec elle ce que Hayek appelait la « loi des effets contraires aux buts poursuivis ».  C’est une des raisons du rejet   populaire qu’elle rencontre très vite.

L’idéologie rejoint la société du spectacle en cela que l’une et l’autre   se fondent sur une simplification des choses, une   vision schématique du réel ayant plus de chances d’atteindre les masses, d’alimenter le spectacle politique qu’une approche complexe ou nuancée. A ce spectacle, il faut des bons et des méchants : la simplification conduit bien souvent au manichéisme et à une intolérance   d’autant plus véhémente que l’idéologue sait au fond de lui qu’il a tort ou qu’il se heurte à la résistance des peuples, disqualifiée comme  « populisme ».

Le second grand caractère d’idéologie est qu’elle porte un projet fondé sur l’idée du progrès (à l’image du progrès scientifique qui, lui, est réel) et donc d’un sens de l’histoire, d’un espoir eschatologique, corollaire d’une péremption radicale du passé : ce n’est pas non plus contradictoire avec la pensée de Guy Debord pour qui « la société du spectacle repose sur la destruction de l’histoire ».   L’idée d’une marche à sens unique de l’histoire fonde celle de modernité : est moderne celui qui est dans le bon sens, est réactionnaire celui qui va contre, une    démarche qui   abolit tout débat puisque la question n’est plus « où est le bien commun ? » mais « qu’est-ce qui est moderne et qu’est ce qui est antimoderne ? »  Elle n‘a de réponse que terroriste.

On comprendra qu’il ne soit, au moins en France, guère possible de remporter une élection sans avoir l’air moderne, sans se poser dans le sens de l’histoire. Fillon, après d’autres, a expérimenté ce qu’un certain air vieillot  dans un discours de vérité[9] pouvait avoir de disqualifiant. Cela, non seulement parce que dans une société toute imprégnée de l’idée   du progrès, la modernité est une valeur positive mais aussi parce que l’univers médiatique dont le pouvoir prescripteur est considérable, est particulièrement sensible à la modernité   avec tout ce qu’elle comporte d’illusion. Toute idéologie visant l’unanimité, on peut dire que la presse se fait d’autant plus monolithique qu’elle est idéologique sans que  soit nécessaire aucun ministère de la Vérité.  

Ce qui, à un moment donné, détermine ce qui est moderne (en dehors de la démarche scientifique et technique au sens strict), c’est l’idéologie : elle est la force de frappe qui impose une idée, un programme, un homme comme plus moderne que ses adversaires. Pour   avoir l’air moderne, il faut être idéologue, ou « politiquement correct », autre nom de la modernité idéologique.

Cette modernité idéologique, il faut le préciser, n’a rien à voir avec la vraie modernité : Macron, pur produit du Sciences po du tout début du XXIe siècle (ultralibéralisme, non-discrimination, mondialisme, anglomanie   etc.) a en réalité dix ou quinze ans de retard : il veut par exemple relancer le processus européen auquel personne ne croit plus. Il est néo-libéral comme d’autres étaient néo-gothiques. Mais étant idéologue, jeune et beau comme un ange saint-sulpicien , il a forcément   l’air plus moderne que ses adversaires. Cela au risque de mettre la France en porte à faux par rapport au vrai mouvement de l’histoire :    un peu comme le programme commun de 1981  avait mis notre pays en décalage avec un monde qui virait déjà au libéralisme intégral.

Or l’idéologie, on ne saurait trop y insister, est inapte à résoudre les problèmes de la France, comme des autres pays,       

D’abord parce que c’est elle qui les a généralement créés : nous avons évoqué les dysfonctionnements   de l’éducation   nationale ; on pourrait évoquer aussi bien ceux de la justice ou encore les tensions internes croissantes qu’une politique idéologique de l’immigration, inspirée par le mondialisme, a créés.  Y a-t-il un seul problème de la société française qui ne résulte des politiques menées depuis 20,30 ou 40 ans, généralement idéologiques, et non d’une évolution endogène de la société ? Ce n’est pas sûr.

Ensuite parce que, ayant créé ces problèmes, l’idéologie ne saurait,  conformément à la prophétie de  Debord,  que les aggraver. Il est significatif que les 4/5 des programmes des candidats proviennent des bureaux des différents ministères, chacun porteur d’une idéologie particulière. Ces ministères, prisonniers d’une certaine culture, ne proposeront rien d’autre que de pousser les choses un peu plus loin dans le sens de leur idéologie propre. Comment demander à ceux qui sont la cause du problème d’y porter remède ?  

En bref, il faut avoir l’air moderne pour être élu. Pour avoir l’air moderne, il faut être idéologue. Les idéologies sont la principale raison des dysfonctionnements de la société. Celui qui s’en inspire et qui est donc le plus apte à être élu, est ainsi,    par définition, le moins apte à résoudre les problèmes aux origines du mécontentement populaire. Tel est le paradoxe d’une démocratie de spectacle dans un univers de plus en plus idéologisé. Nos compatriotes ne tarderont pas à s’en apercevoir. 

 

 

Roland HUREAUX

 

 

 

 

 

 

[1] Libération, 6 septembre 2017

[2] Plusieurs Prix Nobel d’économie, Joseph Stiglitz, Paul Krugman, Amartya Sen, comme l’ancien Prix Nobel d'économie français, aujourd'hui décédé, Maurice Allais, sans  recommander tous  une sortie immédiate,  pensent que l’euro est responsable de la stagnation.  

[3] Ancienne présidente d’Areva, dont   le parquet financier tente  de suspendre les poursuites  engagées à son encontre http://bfmbusiness.bfmtv.com/entreprise/areva-le-proces-uramin-retarde-par-une-bataille-judiciaire-1221515.html.

[4] Déjà la   loi El Khomri, faux nez d’une loi Macron bis, ouvrait la porte entre les lignes à la pratique religieuse en entreprise, avec là aussi des risques de tension.   

 

[5] Marianne, 19 juillet 2017

[6] Guy Debord, La société du spectacle 1967 et Commentaires sur la  société du spectacle, 1988

 

 

[7] « L’utopie (autre nom de l’idéologie) se caractérise par la volonté d’organiser les activités sociales jusque dans le détail à partir d’un principe unique » (Jean Baechler,   Qu’est-ce que l’idéologie ? Idées-Gallimard, 1976, page 95)

 

[8] Ainsi le ministère de la Santé pousse à la fois à la fonctionnarisation des médecins et la libéralisation des pharmacies.

[9] Ce disant,  nous n’approuvons pas tout le programme de François Fillon, déficient à certains égards mais certainement pas démagogique.

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 05:50

L’IMMENSE MALENTENDU

 

Quoique  60 % des Français, selon les sondages, n’aient pas souhaité   pas que le nouveau président ait la majorité ,   la vague En Marche  a été fort peu  amortie au second tour des élections législatives, sur    fond de résignation et d’abstention encore plus grande  qu’au premier tour.

LREM  a raflé la majorité absolue des  sièges  de   la nouvelle Assemblée.

Les  candidats En Marche, inconnus pour la plupart, se son retrouvés  en tête aussi bien à Aubervilliers que dans le 7e arrondissement.

Ici les électeurs de droite ont voté  En marche pour se débarrasser des caciques de droite qu’ils avaient  trop vus. Là les électeurs de gauche ont voté En Marche pour ne plus voir des caciques de gauche trop usés. Les uns croient qu’En marche est une droite moderne, les autres qu’elle est une gauche moderne.

Il y a fort à craindre que cette apparente convergence du vote de quartiers ou de régions de France que tout sépare ne recouvre un immense malentendu.

 

Malentendu sur les hommes

 

Malentendu sur la qualité des hommes : les électeurs veulent donner un « grand coup de balai » à une classe politique qu’ils imaginent corrompue : place aux jeunes ! Rien ne laisse pourtant supposer que les nouveaux soient plus vertueux    que les anciens. Les affaires que l’on signale ici ou là au sujet de certains, en sus de l’affaire Ferrand   laissent craindre le contraire. Mais le crédit fait aux macronistes est tel que personne ne veut entendre ces signaux. Qui pourrait croire que, parmi 577 candidats recrutés çà et là, à la va vite, hors des cercles politiques et donc sans visibilité antérieure, ne se soient pas glissés  quelques aigrefins ? En  tous les cas beaucoup de médiocres. D’autant que l’adhésion à ce mouvement n’exige aucune conviction précise. Rien de commun avec la vague de 1959 qui avait subi l’épreuve de la Résistance ou avec  celle de 2001, longuement mûrie dans le giron des mandats locaux : celle-là vient de nulle part. 

Tout laisse penser au vu des exemples que l’on entraperçoit ici ou là que le niveau des élus de la nouvelle vague (en dehors de tel  grand mathématicien emblématique) sera très inférieur à celui des sortants, pourtant pas mirobolant lui non plus.  Beaucoup de candidats En marche, en tête au premier tour, ont refusé  les débats de second tour de peur d’y perdre la face. Leurs prestations publiques ont été souvent lamentables. A part quelques  chevaux de retour du centrisme comme Jean-Louis Boulanges ou Marielle de Sarney qui, après des années aux marges ont trouvé là une occasion inespérée d’émerger, la plupart des nouveaux élus n’ont pas d’expérience de la vie parlementaire. Cela promet de beaux pataquès. Ils s’y feront, dit-on, ce qui veut dire sans doute qu’ils sauront bien vite revenir aux ornières… 

 

Malentendu sur les projets

 

On compare volontiers cette vague à celle qui avait suivi l’élection du général de Gaulle en 1959 ou de François Mitterrand en 1981. Mais De Gaulle savait ce qu’il allait faire. Mitterrand devait appliquer   le programme commun de la gauche. A part la réforme du Code du travail et la prétendue moralisation de la vie politique   dont personne n’espère  rien, et peut-être un peu plus tard la fort contestable   PMA pour couples homosexuels, qui peut dire ce qu’on peut attendre   de la nouvelle majorité ?  Au vu du programme du nouveau président, à quelques mesures cosmétiques près, rien ne laisse pressentir autre chose qu’un quinquennat Hollande bis. Tout le contraire du renouvellement attendu. 

Peut-être beaucoup des nouveaux députés imaginent-ils   pouvoir, par un changement d’ « esprit », porter remède à l’immense malaise des Français. Mais que savent-ils ils des raisons de ce malaise ? Combien d’entre eux ont une connaissance assez fine de la chose publique pour en analyser les causes ? Le président lui-même l’a-t-il ?

Il est à craindre au contraire que, partageant de manière assez imprécise le souci de faire du neuf, la plupart ne soient prisonniers des archétypes idéologiques soi-disant modernes qui sont, dès qu’on les étudie un à un, la principale cause des maux dont souffrent nos compatriotes ? Plus d’intercommunalité et de décentralisation alors que les maires et les contribuables en sont   accablés ? Plus d’Europe pour résoudre le chômage et simplifier les règlementations ? Plus d’ « ouverture à l’autre » pour prévenir le terrorisme ? On ajouterait plus de pédagogie pour résoudre l’illettrisme, si le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, n’avait pris quelques mesures de bon sens plutôt rassurantes dans le climat de déraison   où nous nous trouvons : retour au redoublement, au latin, aux classes d’élite dites bilingues - pas question en revanche de remettre en cause la méthode globale, la plus grande des folies. Mais précisément ces mesures montrent que seul est populaire et efficace ce qui apparait rétrograde par rapport aux modes. Et il en est ainsi dans presque tous les domaines. Ce qu’attendent en réalité les Français :  tout le contraire du macaronisme. Macron ne réussira qu’en   faisant de l’anti-Macron.

 

Malentendu social

 

Reste le malentendu sur les orientations sociales du nouveau gouvernement. On frémit à voir les masses de gauche (à ne plus confondre avec la classe ouvrière, la vraie ou ce qu’il en reste, qui vote à près de 50 % pour   le Front national : toujours les « damnés de la terre ! ») se précipiter pour soutenir un gouvernement   dont le seul projet immédiat sérieux est la réforme du Code du travail laquelle ne vise à rien moins qu’à abroger un siècle de progrès social.  La grande devise de l’ultralibéralisme : « marche ou crève » !   Gageons qu’il ne faudra pas attendre pour que Neuilly et Saint Denis cessent d’être en marche dans   le même sens. Les malentendus sont fréquents en politique mais ils ne durent généralement pas longtemps.

 

Roland HUREAUX

Juin 2017

 

 

 

 

 

 

   

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 05:49

L’INSTRUMENTALISATION DE LA JUSTICE DANS L’AFFAIRE FILLON REPRESENTE UNE SUBVERSION DE L’ETAT DE DROIT ENCORE PLUS GRAVE QUE CE QU’ON A DIT  

 

Qui peut douter du caractère profondément subversif à l’égard de nos institutions de l’attaque menée à la fois par la justice et par la presse contre François Fillon principal candidat de la droite classique à l’élection présidentielle de 2017 ?

On pourra déjà relever les multiples infractions à la   loi qui ont émaillé la procédure lancée à son encontre : entre autres viol et recel de viol du secret de l’instruction, viol et recel de viol du secret fiscal.  Ce sont ces infractions qui ont permis par exemple que le 25 janvier, une information visant   François Fillon soit ouverte l’après-midi même du jour où un hebdomadaire satirique avait relaté un certain nombre de faits relatifs à l’emploi de son épouse.  Alors même que la justice est si lente en tant d’autres circonstances.    

On pouvait aussi se demander si le délit soupçonné était bien de la compétence du parquet financier et même si, séparation des pouvoirs oblige, il ne relevait pas plutôt de la discipline interne au pouvoir législatif.

 

La trêve judicaire existe

 

Mais la subversion est encore plus grave que tout cela car c’est la procédure elle-même qui viole sinon la lettre du moins l’esprit de la loi.  

L’article L. 110 du Code électoral, dispose en effet   qu’ « aucune poursuite contre un candidat, en vertu des articles L. 106 et L. 108, ne pourra être exercée, aucune citation directe à un fonctionnaire ne pourra être donnée en vertu de l’article L. 115 avant la proclamation du scrutin ». L’article 110, prévu à l ‘origine pour les élections législatives et locales, a été rendu applicable à l’élection présidentielle par la loi organique du 6 novembre 1962. 

Ce n’est donc pas seulement l’usage qui instaure au bénéfice des candidats en période électorale ce qu’il est convenu d’appeler une « trêve judiciaire », c’est la loi.

Il est vrai que cette disposition ne couvre pas exactement l’affaire Fillon, cela pour trois raisons : la mise en examen, le 14 mars, a eu lieu avant l’ouverture   de la campagne électorale, le 20 mars (et même le 9 avril si on veut s’en tenir à une interprétation étroite), elle ne concerne pas des faits de corruption mais seulement un soupçon d’emploi fictif, Madame Fillon n’étant pas candidate, elle a pu être, elle, mise en examen pendant la campagne électorale.

Mais loin de témoigner de  la régularité de la procédure, ces détails montrent plutôt  qu’on s’est servi de la lettre des textes, pour engager une action manifestement contraire à leur esprit. 

S’il est vrai que l’article 110 du code électoral est limitatif, on peut, au vu du contexte, en inférer facilement que ce n’est pas pour exclure la période antérieure, ni les autres griefs que ceux de corruption que le législateur a marqué ces limites, bien au contraire.  

L’article 110   est issu de la loi du  31 mars  1914 sur laquelle  le rapporteur a pu  apporter en son temps  la précision suivante , immédiatement ratifiée par le Garde des sceaux :    «Il reste entendu qu’aucune poursuite, hormis le cas de flagrant délit et de violence matérielle, qu’il importe de réprimer immédiatement, aucune poursuite tendancieuse cherchant à déshonorer le candidat, en le rendant suspect de faits qu’il n’a peut-être pas commis, ne doit être permise pendant toute la période électorale. C’est l’esprit dans lequel devra être appliquée la loi. »

L’esprit du texte est donc clair : il vise à écarter l’inférence judicaire de la procédure électorale.  

Ajoutons qu’au moment où    il a été voté, les campagnes électorales étaient plus courtes que ne l’est aujourd’hui une présidentielle. 

Le juriste Romain Rambaud[1], tout en ayant le grand mérite de rappeler cette disposition émet l’hypothèse elle pourrait être obsolète, n’ayant donné lieu à aucun contentieux ni à aucune jurisprudence. Mais n’est-ce pas   tout   simplement   parce que cette disposition, profondément ancrée dans la tradition républicaine, avait été jusqu’ici respectée. Une loi que l’on respecte serait-elle obsolète ? Elle l’est si peu que, dans le même esprit, la loi no 82-213 du 2 mars 1982 créant les Chambres régionales de comptes dispose expressément que les conclusions des chambres relatives à la gestion d’une collectivité locale ne pourront pas être rendues publiques dans les six mois qui précèdent une élection municipale. La Cour des comptes, elle, n’a pas besoin d’un texte pour respecter comme une évidence cette obligation de réserve. 

Il ne s’agit en effet pas seulement d’une loi ou d’un usage mais de ce qu’Orwell appelait la common decency, ces règles de modération non écrites mais évidentes sur lesquelles reposent tant la vie en société que la démocratie.

Rappelons que lors de l’élection présidentielle de 1965, François Mitterrand était encore sous le coup d’une inculpation relative au faux attentat de l’Observatoire. Le général de Gaulle avait alors expressément refusé que cette procédure, déjà vieille de six ans, soit réactivée.

Autre temps, autres mœurs. Autres hommes aussi.

 

Contre la   séparation des pouvoirs

 

Si l’on admet que le code électoral a voulu écarter l’interférence de la justice dans le processus électoral, on peut rappeler aussi qu’il   s’inscrit dans une tradition à la fois plus fondamentale et     plus ancienne que la République elle-même puisqu’elle date de l’Assemblée constituante laquelle, à l’article 13 du titre II de la loi des 16 et 24 août 1790, toujours en vigueur, dispose que :

« Les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler de quelque manière que ce soit les opérations des corps administratif, ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions ». Un interdit repris par la  loi du 16 fructidor an III:  «Défenses itératives sont faites aux tribunaux de connaître des actes d'administration, de quelque espèce qu'ils soient, aux peines de droit».

Certes il n’est question  que d’administration mais les élections ont pour but de désigner ceux qui la dirigeront et elles peuvent même être tenues elles-mêmes pour des opérations administratives.

Au reste on n’a pas assez dit   que ce n’est pas tant   la justice (au sens de magistrature assise) qui a interféré dans le processus électoral mais le pouvoir exécutif lui-même. Le parquet financier, comme tous les parquets est aux ordres du Garde des sceaux, lequel est aujourd’hui, de fait, subordonné au président de la République (quand il dispose, comme c’est le cas, d’une majorité). II est même parfois question de rattacher le parquet au ministère de l’intérieur.

Le juge d’instruction, lui, est en théorie indépendant mais sa désignation par le parquet au sein d’un corps judicaire hautement politisé ne saurait être neutre. C’est ainsi que la plupart des observateurs interprètent celle qui a été effectuée   dans l’affaire en cause.

L’extrême diligence dont a fait preuve le parquet financier à l’encontre de François Fillon contraste avec la passivité avouée de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique et le Parquet de Paris, sollicités en vain notamment par l’association Anticorps, pour instruire le cas   d’Emmanuel Macron, principal bénéficiaire de l’opération, dont les obscurités financières devraient susciter, plus que les affaires de François Fillon, des interrogations.   

Aucun président de la République depuis 1958 (et a fortiori avant), même quand il était candidat à sa propre succession, n’avait interféré de manière aussi flagrante avec le processus électoral que ne l’a fait Hollande,

Qu’en instrumentalisant la justice le président ait    gravement manqué à l’obligation que lui fixe  l’article 64 de la Constitution : « Le Président de la République est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire », ne doit sans doute pas le gêner :     en ces temps de cynisme généralisé, une obligation qui n’a pas de sanction n’éveille guère de scrupules.  N’a-t-on pas cependant affaire à un de ces graves manquements aux devoirs de la charge suprême qui justifient le qualificatif de haute trahison ? 

On peut aller plus loin et dire que la double interférence du pouvoir exécutif   et de l‘autorité judicaire dans l’élection présidentielle, que certains qualifient non sans motif de « coup d’Etat », remet en cause l’Etat de droit lui-même     puisque, rappelons- le, par-delà la constitution en vigueur, par-delà la République elle-même, il y a la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789  dont l’article 16 dispose que  « toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution. ». Point de constitution, voilà où Monsieur Hollande nous aura menés.

 

Roland HUREAUX

Juillet 2017

 

 

 

 

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L’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen dispose que  « toute société dans laquelle la séparation des pouvoirs ( n’est pas) déterminée, n'a point de Constitution. ». L’article 13 du titre II de la loi des 16 et 24 août 1790, toujours en vigueur, dispose que : « Les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler de quelque manière que ce soit les opérations des corps administratif,  interdit repris par la  loi du 16 fructidor an III 

La loi du  31 mars  1914 (article 110 du  Code électoral  interdit la poursuite pou fait de corruption de candidats en campagne .

La loi no 82-213 du 2 mars 1982 interdit aux  Chambres régionales de comptes dispose de rendre publiques  les conclusions de leurs enquêtes   dans les six mois précédant une élection.

 

 

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 05:45

LA PUNITION DE LA FRANCE

 

Macron, instrument de la mise en tutelle de la France

 

http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/La-punition-de-la-France

 

" Il faut ignorer l'Allemagne, pardonner à la Russie et punir la France." La déclaration faite en mars 2003 par Condolezza Rice, la conseillère du président Bush pour la sécurité nationale, est la réaction au refus de notre pays de participer   à la deuxième guerre du Golfe.

Thomas L. Friedman, le célèbre éditorialiste du New York Times, allait plus loin :  pour lui, la France « n'est pas seulement une alliée irritante ou une rivale jalouse. Elle est devenue l'ennemie des Etats-Unis ».

 

Delenda est Gallia

 

Qu’avait donc fait la France ? Avait-elle envoyé des commandos au secours de Saddam Hussein ? Lui aurait-elle livré des armes   ?   Avait-elle interdit le survol de son territoire aux avions de l’OTAN ? Pas le moins du monde :  elle s’était contentée de ne pas participer à la coalition qui a détruit l’Irak en 2003 dans une guerre   qui, selon Donald Trump lui-même, fut une erreur. Une erreur fondée sur l’idée que l’Irak avait un programme d’armes de destruction massive, ce qui s‘est avéré faux. Mais l’Empire à son apogée (ou à son déclin ?) est ombrageux : il veut désormais des alliés inconditionnellement  alignés.

Qu’a donc été la punition promise par Mme Rice ?

Nous le savons aujourd’hui : empêcher que la France ait des présidents susceptibles de s’écarter de quelque manière que ce soit de la ligne américaine, et qui   donc   aient quelque personnalité. Bref, priver la France de chefs susceptibles de s’opposer aux Etats-Unis ou même de faire le moindre écart par rapport à leurs diktats.

C’est ce qui est arrivé à partir du retrait de Chirac.

Sarkozy avait certes quelque caractère mais il était intellectuellement   acquis à l’hégémonie américaine. Il a fait voter le traité de Lisbonne, réintégré la France dans le dispositif militaire de l’OTAN, s’est engagé dans la guerre de Libye et a participé au déclenchement de la guerre de Syrie.

Hollande a été un allié encore plus docile, voire servile du grand frère américain et de l’ensemble des    forces occidentales qui le soutiennent.

La faiblesse de ces personnalités, leur   manque de classe, l’alignement veule de la diplomatie française sur celle de l’OTAN, y compris contre nos intérêts les plus évidents même quand cette diplomatie s’est avérée criminelle (soutien aux terroristes), tout cela a conduit à un mépris universel pour la France. Elle ne compte plus et personne ne s’intéresse à ce que disent ses représentants, spécialement le dernier président.

Le discours de Villepin à l’ONU sous Chirac en 2003, avait été le chant du cygne de la diplomatie française, précisément ce qu’il fallait punir[1].

 

Les mécanismes de l’asservissement

 

Comment en est arrivé à pareil résultat ?

Il fallait en tous les cas contourner l’obstacle de l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel    voulue expressément par le général de Gaulle   pour s’assurer que le président français aurait du caractère.

Quand quelqu’un comme Condolezza Rice parle comme elle l’a fait, c’est qu’elle avait   quelques moyens d’agir sur notre pays, autres que le boycott du roquefort. Loin de nous de voir en tout   l’effet d’un complot. Il reste que ces néoconservateurs   américains dont elle était le porte-parole savaient ce qu’ils disaient en parlant de « punir la France ». Par quelles manipulations comptaient-ils le faire ?  Nous n’en aurons pas de sitôt le dernier mot.  Wall Street n’intervient pas forcément de    manière directe :  il subventionne des fondations   qui n’ont rien d’autre à faire qu’à suivre la politique des Etats européens et à veiller à leur alignement.

Ils utilisent pour cela des moyens variés. Les demi-habiles, comme disait Pascal, croient que l’influence passe par des pressions économiques : une bonne politique du personnel, planifiée assez en amont, est bien plus efficace[2].  Le recours au chantage n’est pas exclu. A tort ou à raison, certains voient dans la docilité d’Angela Merkel l’effet de   telles méthodes.  C’est pourquoi les plus vulnérables à ces pressions ont plus de chances qu’on les laisse émerger   -  comme autrefois les Soviétiques avaient   favorisé l’élection au secrétariat général des Nations unies de Kurt Waldheim dont ils étaient les seuls à connaitre le passé nazi. Mais   l’élection de candidats médiocres résulte aussi de l’élimination de  ceux qui le sont moins, qui pourraient avoir l’audace de jouer les fortes têtes dans le concert européen ou atlantique.  Beaucoup ne se doutent même pas qu’ils   ont été victimes de cette impitoyable mécanique. 

Il ne faut pas pour autant imaginer une organisation internationale centralisée. C’est de soft power qu’il s’agit :  les adhérents à la doxa internationale dans les pays concernés sont suffisamment nombreux et puissants (spécialement dans les médias et en France), pour agir par eux-mêmes.

 

Le cas Macron

 

La présente   élection présidentielle met au jour de manière particulièrement visible, voire caricaturale, ces mécanismes par lesquels on veut « punir la France ».

Nombre de Français se désolent de ne retrouver au second tour que Marine Le Pen installée par l’appareil médiatique dans la position du repoussoir   et Emmanuel Macron lequel, comme par hasard, apparait comme la figure achevée du leader dont les réseaux   transatlantiques   rêvent. Il est peu compétent en politique internationale et donc prêt à s’aligner sur l’Allemagne, Bruxelles et surtout l’Etat profond américain qui a soutenu   Hillary Clinton et qui, malgré Donald Trump, promeut un état de guerre larvée contre la Russie et   poursuit politique de déstabilisation de la Syrie en s’appuyant sur les djihadistes.  Un Macron partisan non seulement de maintenir mais de renforcer l’Europe et de l’euro, partisan de toutes les évolutions libertaires (mariage homosexuel en tête), du libre-échange et du mondialisme avec sa    conséquence, l’écrasement des classes moyennes, partisan de l’immigration et donc de l’arasement des classes populaires et de la balkanisation du pays, du reniement de la France (coupable selon lui de crime contre l’humanité et qui n’a pas de culture !). On pourrait continuer : sur aucun sujet, nous disons bien aucun, Macron ne s’écarte du discours dominant chez  les forces qui le soutiennent. Pourquoi le candidat préféré des médias colle-t-il d’aussi près à la doxa ?  Adhésion spontanée, personnalité immature et flexible apte à prendre les postures que l’on attend de lui ou bien contrainte implacable de ses mentors ?  Rappelons que le premier dîner de levée de fonds de Macron   a été organisé à Londres par un cadre de Goldman Sachs, or ces gens ne plaisantent pas : ils exigent un alignement à 100 %.

C’est précisément ce qu’ils ne trouvaient pas chez Fillon. Malgré la discrétion du candidat   des Républicains et son adhésion à l’essentiel de la doxa : libre-échange, Europe de Bruxelles, euro, programme économique libéral, non remise en cause des « avancées » libertaires, François Fillon voulait, conformément à la tradition gaulliste, faire évoluer la position française l’égard de la Russie. De même que la France de Chirac avait été tenue pour une ennemie de l’Amérique par sa simple abstention dans la guerre d’Irak, la politique de Fillon était jugée inacceptable car non entièrement alignée.

La haute banque, avec tout ce qui tourne autour, ne se contente plus d’un   pouvoir d’influence sur des hommes que le peuple élirait librement, elle veut   désormais prendre le contrôle direct du pouvoir politique. A l’évidence Macron est    l’instrument consentant et passif de   cette prise de contrôle.

La victoire de Fillon à la primaire des Républicains, contre un Juppé préprogrammé lui aussi, témoignait d’une perte de contrôle momentanée du système.   Eliminer par tous le moyens Fillon   que cette victoire    plaçait sur orbite pour la présidence, tel était le but de l’opération de déstabilisation fondée sur les salaires (parfaitement légaux) versés à son épouse, exécutée par une justice aux ordres et   relayée en grand par une presse désormais monolithique. Que l’opération ait été concoctée par Macron, principal bénéficiaire, et ses proches, Hollande et Jouyet en tête, qui peut en douter ?

Cette opération    viole, est-il nécessaire de le rappeler ?   tous les usages   de la République par l’ingérence éhontée de la justice dans un processus électoral, sorte de « coup d’état » sans précédent dans l’histoire électorale de notre pays.  

Elle vise à porter à l’Elysée par tous les moyens Emmanuel Macron, punition suprême du peuple français.  Le peuple français se laisser a-t-il encore manipuler ? On aurait tort de sous-estimer sa capacité de réagir.

 

Roland HUREAUX

Juillet 2017

 

 

 

 

 

 

 

 

 
 

 

 

[1] Cela dit sans préjudice de l’évolution ultérieure de Villepin qui, au demeurant, avait été , avec l’affaire Clearstream, la première victime du  mécanisme  que nous décrivons.

[2] Le film de Polanski, The ghost writer, illustre à merveille cette planification très en amont du personnel politique européen. Les révélations qu’il contient ne sont évidemment pas étrangères aux problèmes judiciaires rencontrés par le réalisateur, à partir de faits vieux de 40 ans.

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 05:22

Pour des motifs techniques, l'enregistrement de mes articles dans le blog a été interrompu pendant quelques mois.

Il reprend ce jour.

Le nombreux articles  écrits et publiés pendant   ce temps seront ainsi  présentés d’un coup.

Ils seront ordonnés, si possible, dans l’ordre chronologique mais, au cas où celui-ci ne serait pas exactement respecté, les lecteurs du Blog  le reconstitueront sans mal en se référant à l’actualité.    

Veuillez nous excuser de ce contretemps.

R.H.

 

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14 septembre 2017 4 14 /09 /septembre /2017 22:43

 

Les Républicains risquent de commettre une erreur stratégique en mettant la défaite présidentielle sur le compte exclusif de Fillon 

 

https://www.causeur.fr/francois-fillon-lr-sens-commun-wauquiez-146667

 

Le parti Les Républicains cherche les voies d’une refondation, en particulier au travers de l’élection prochaine d’un nouveau président.

S’il est aujourd’hui un commun dénominateur entre les différentes factions qui se disputent la direction, c’est le rejet de François Fillon coupable selon la plupart des dirigeants et beaucoup de militants  d’avoir conduit le parti à l’échec à la présidentielle.

Pour certains, le rejet va plus loin. Fillon s’étant incidemment déclaré catholique et ayant bénéficié, quand beaucoup le lâchaient, du soutien, très peu décisif en vérité, du mouvement   Sens commun issu de la Manif pour tous, tout se passe comme si la référence à la religion historique de la France était devenue infâmante, alors même que la droite française s’est longtemps organisée autour de l’Eglise catholique. Pourtant François Fillon, homme prudent, n’avait jamais remis en cause dans sa campagne les changements sociétaux apportés par le gauche – sauf l’extension du délit d’entrave à l’IVG, ce qui était bien le moins.  

François Fillon s’étant retiré de la politique active, il est bien peu de gens pour prendre sa défense.

Or il y aurait en effet beaucoup à dire sur le procès sommaire qui lui est fait.

 

Mieux que Jacques Chirac

 

N’oublions pas qu’il a atteint, de justesse il est vrai, les 20 %, dans un climat de rejet des partis portiques qui avaient tenu le haut du pavé jusque-là , à comparer aux 6,5 % où est tombé Benoît Hamon le candidat du parti socialiste pourtant bien moins chargé d’opprobre que celui de LR.  Jacques Chirac n’a, lui, jamais n’atteint les 20 % dans un premier tour de présidentielle. Les promesses mirifiques d’après la primaire, où certains sondages   plaçaient Fillon près de 30 % n’ont certes pas été tenues, mais ces chiffres étaient gonflés par l’« état de grâce » qui suit toujours l’entrée en scène d’un candidat   et étaient appelés de toutes manières à se dégonfler, comme se sont dégonflés ceux de Marine Le Pen créditée elle aussi de 30 % en début de campagne.

On dit qu’il aurait dû se retirer en faveur d’autres   candidats qui auraient fait mieux. Qui ?  Baroin ?  Juppé ? Juppé avait certes les faveurs d’une certaine gauche mais    il aurait cédé pour cela plusieurs points   à Marine Le Pen :  le piètre score de la candidate du FN au premier tour est largement dû à la résistance de Fillon.  Qui sait d’ailleurs si, gagnant le primaire, Juppé n’aurait pas fait l’objet, lui aussi, d’une campagne de démolition, comme cela avait été le cas de Philippe Séguin, au départ favori des médias, à Paris en 2001 ?   Un face à face Juppé-Macron, aurait pu être  incertain compte tenu de la proximité des idées des deux hommes mais quelles auraient été les chances du plus âgé face à des électeurs en recherche de renouvellement ?

 

La principale erreur de Fillon : son programme

 

 Si François Fillon doit regretter quelque chose, c’est un programme inutilement agressif vis-à-vis des salariés et des classes populaires.  Ce programme  était peut-être bon pour  gagner la primaire dans un parti où les chefs d’entreprise sont influents, mais sûrement pas l’élection. Nul ne conteste (en dehors de Macron qui s’est bien gardé d’en parler) la nécessité de réduire les effectifs de la fonction publique mais il n‘était pas nécessaire de donner à ce projet le tour vindicatif anti-fonctionnaire   qu’il avait dans le programme de Fillon. Même erreur de communication s’agissant de la Sécurité sociale dont les gens ont compris qu’on voulait la « privatiser ». Beaucoup de fonctionnaires de droite (ils sont plus nombreux qu’on croit) ne se sont pas détournés mais refroidis : quand Fillon  a été attaqué ils n’étaient  pas   au rendez-vous .

Personne ne doute que les reproches qui lui ont été faits au sujet de son épouse étaient peu de choses auprès des vraies turpitudes de la République, notamment auprès de celles qu’on a pu soupçonner chez Macron, sujet sur lequel   ni la justice ni la presse n’ont daigné enquêter, et sur lequel Fillon aurait sans doute eu intérêt jouer la contre-offensive plutôt que de s’enfermer dans une piteuse  défensive.

Il reste que malgré les attaques d’un incroyable violence et totalement disproportionnées à l’encontre de Fillon, malgré le soutien quai-unanime des médias à Macron, à une semaine du premier tour, ce dernier ne décollait pas de 20 % et Fillon se maintenait au même niveau. Ainsi, les quatre candidats principaux, en incluant Marine Le Pen en baisse et Mélenchon en hausse, se tenaient autour de 20 %.

 

Le rôle décisif des stratèges de la gauche

 

Ce qui s’est passé ensuite a été peu évoqué : dans les quelques jours qui ont précédé le premier tour, une stratégie délibérée, en partie pilotée de l’Elysée,  a conduit à rabattre environ 5 % des voix de gauche   de Hamon, tenu pour définitivement perdu, vers Macron. Nul enthousiasme pour le macronisme   là-dedans, seulement un vote utile destiné à    préserver les prébendes , les secrets et les réseaux de gauche.  C’est une affaire qui s’est produite entièrement au sein de la gauche, entre gens de gauche : on ne voit comment on pourrait reprocher   à Fillon, ou à quelque chef de la droite que ce soit de n’y avoir pu y faire  obstacle.

La raison de fond pour laquelle une telle manœuvre   a pu réussir est que les électorats du PS et d’En marche étaient beaucoup plus  proches et donc   plus fongibles que ceux de LR et du FN entre lesquels un fossé important s’est creusé au fil des ans, ce qui n’est   pas sûrement pas la faute exclusive de Fillon.    

Le résultat, on le   connait : Hamon est tombé plus bas que prévu et Macron a pris les quelques points d’avance qui lui ont permis d’apparaitre comme le grand vainqueur du premier tour. Marine Le Pen, quoique affaiblie,  se maintenait de peu avant Fillon, ainsi éliminé.

Le rejet irraisonné du fillonisme s’est mué en rejet des catholiques dont le PCD a fait les frais : en témoignent l’annulation de l’investiture de Xavier Lemoine, dont l’expérience des banlieues eut été précieuse au sein du groupe LR[1] et l’offensive de Juppé ciblée sur Jean-Frédéric Poisson. Il est clair que la clan ultra-laïque, désormais fort au sein de LR supporte de plus en plus difficilement que l’on aille à   la messe dans un parti pourtant   fondé par le général de Gaulle. Une attitude d’autant plus absurde que les catholiques séduits par Macron, stupidement on le concèdera, ont au moins été aussi nombreux que ceux qui sont restés fidèles à l’ancien premier ministre.  

L’aboutissement de ce rejet, on le voit assez clairement.

L’un est une perte d’identité :  ceux qui risquent de se retrouver en position dominante au sein de LR seront les « macro-compatibles » dont on se demande toujours ce qui les distingue d’En Marche : d’ailleurs, beaucoup d’entre   se le demandent aussi. Certains  s’apprêtent à quitter le parti si la ligne droitière qu’incarne Laurent Wauquiez l’emporte, comme ce n’est pas invraisemblable, même si  la présence de la juppéiste Virginie Calmels à ses côtés devrait les rassurer.

L’autre est l’ouverture d’un espace important entre LR et   le FN qui donne dans la perspective des prochaines échéances, un singulière marge de progression à ce dernier.  Est-ce bien le but recherché ?

Autant que la mémoire de Fillon, ce qui est en jeu, c’est   qu’une analyse erronée de la présidentielle ne conduise Les Républicains à commettre une grave erreur stratégique.  

 

Roland HUREAUX

 

 

 

  

 

 

[1] On peut penser au vu des résultats qu’il aurait emporté le siège, passé à En marche.

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