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Roland HUREAUX

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18 juillet 2013 4 18 /07 /juillet /2013 21:57

 

LA SCANDALEUSE RETENTION  DU PRESIDENT BOLIVIEN 

 

 La honte, le dégoût, le mépris pour  une conduite aussi vile.   C’est ce qu’inspire le lamentable épisode de l’arrêt forcé, le 2 juillet, de l’avion d’Evo Morales président de la Bolivie  à Vienne,  au motif qu’il  aurait pu servir à exfiltrer le malheureux Edward Snowden de Russie en direction de l’Amérique latine.

Honte redoublée de voir que sont en première ligne  les quatre grand pays  latins de l’Europe,   la France, l’Espagne,  l’Italie, le Portugal   qui ont ainsi démontré à la face du monde – et en premier lieu à leurs cousins d’Amérique latine, qu’ ils n’existent plus en termes de   géopolitique,  eux qui, au cours des siècles, ont porté  au moins aussi  haut que les Anglo-Saxons la civilisation européenne.

On ne sait ce qu’il y a de plus extravagant  ans cet événement : l’ignorance du droit international par les services en causes  qui,  apparemment, ne savaient pas qu’un avion présidentiel était inviolable ? Le mépris pour un  pays d’Amérique   latine – que  tous les autres ont pris pour leur compte ?  Ou surtout l’immense lâcheté à l’égard de puissance  hégémonique mondiale ? Que le drapeau français ait été brulé à la Paz, que faire d’autre sinon encaisser les dents serrées cette marque de mépris méritée !

Car quoi ? Edward Snowden serait-il un criminel ayant commis des meurtres  abominables ?  Non, il n’a rien fait   que divulguer des informations  sur les menaces  qui pèsent sur nos libertés, celles des citoyens américains mais aussi les nôtres.  Serait-il un agent étranger ayant gravement nui aux intérêts  de la France et des autres pays en cause ?  Non seulement il n’a pas nui aux intérêts de la France et des autres pays européens mais il  les a servis en les  prévenant des  dangers qui pèsent sur eux  et aussi   sur  les institutions  européennes,  objet d’une surveillance étroite et de tous les instants de la part des services de renseignement  américains.

Non seulement les pays en cause  et ceux de l’Europe    en général ne devraient pas  s’inquiéter que Snowden survole leur territoire pour se mette à l’abri d’un appareil de répression impitoyable, mais ils auraient dû faire assaut d’hospitalité en lui proposant tous l’asile politique.  Car si  l’on examine les conventions internationales, qui mieux que lui entre dans le champ d’application du droit d’asile ?

Vous oubliez, dira-t-on, que les Américains sont nos alliés ? Mais alors,  pourquoi nous traitent–ils en ennemis, espionnant tous les faits et gestes de l’ensemble de nos institutions et citoyens ?

On a blâmé le général  Franco, à juste titre,  d’avoir  plongé l’Espagne    dans les ténèbres d’une dictature, sans doute pas  totalitaire mais tout de même particulièrement pesante.  Mais au moins sut–il  s’exonérer en 1962, au nom de la Hispanidad, de l‘ordre  que  les Etats-Unis donnèrent à tous leurs partenaires occidentaux, d’appliquer le blocus aérien de Cuba.  Ses successeurs de la droite libérale, aujourd’hui au pouvoir, se sont avérés au-dessous de tout dans cette affaire,  allant jusqu’à laisser leur ambassadeur à Vienne tenter de fouiller l’avion du chef d’Etat bolivien ! Le gouvernement socialiste  français n’a pas été plus brillant.

Les services de contrôle aérien de l’Europe se sont comportés, de manière réflexe ou sur ordre venu de haut, on ne sait,   comme les courroies de transmission, non   des pouvoir nationaux, ni  d’un pouvoir européen plus fantomatique que jamais, mais de l’hyperpuissance transatlantique. Une hyperpuissance qui, en se livrant à  la  surveillance généralisée des télécommunications  publiques et privées,  menace gravement les libertés publiques chez elle et chez  ses alliés et  démontre que   son appartenance à la sphère des  démocraties  libérales est devenue problématique.

Se faire le serviteur zélé de qui vous tient sous sa galoche, même s’il ne vous demande  rien ! Comment   l’épisode  Morales ne   nous instruirait-il  pas sur  les ressorts psychologiques à  l’œuvre dans   les pays occupés entre 1940 et 1945 où tant les    gouvernements de collaboration que leurs services eurent souvent   à cœur de devancer les requêtes de l’occupant  ou d’aller au-delà de ce qu’il  leur demandait (sans que nous confondions naturellement les puissances tutélaires)  !

L’Europe des Vingt-huit  devait être, selon  ses promoteurs,  l’instrument de l’affirmation de l’indépendance   européenne. Comment, dès lors, après soixante   ans de « construction européenne »  ont-ils pu aboutir à   des  réflexes  conditionnés d’une telle  servilité,  et précisément chez ceux, les Latins,  qui devraient plus que d’autres, au sein de la sphère occidentale,   affirmer leur  différence  du fait de leurs racines latines et catholiques ?  

Mais comment s’en étonner à partir du moment où le « progrès » de l’Europe n’a jamais été conçu par ses promoteurs que comme une attrition progressive du sentiment national ? L’Europe institutionnelle   a-t-elle cherché à être autre chose que   l’instrument de cet  asservissement mental,   de ce broyage des colonnes vertébrales, peut-être même de ce dérèglement des esprits  dont nous voyons le résultat ? 

En tous les cas, c’est nous,  dont le libéralisme est suspect puisque nous ne sommes pas des inconditionnels de la culture anglo-saxonne,  qui nous inquiétons le plus  de la dérive des libertés qu’implique   le programme Prism de la NSA !

C’est nous dont l’ouverture au monde est mise en doute   parce que nous sommes  réticents aux grandes constructions multilatérales  de l’Union européenne ou  de l’OTAN, qui nous indignons du mépris dans lequel on a pu  tenu un pays ami comme la Bolivie et, par-delà,  toute l’Amérique latine.

Cet épisode lamentable  suscitera-t-il   un sursaut, un vrai mouvement de fierté  des Européens, spécialement des Latins ?  Il faut l’espérer mais on peut  en douter au vu de la vitesse avec laquelle la presse française s’est empressée de le passer à la trappe. L’entreprise européenne n’a pourtant de sens que s’il permet ce sursaut.

 

Roland HUREAUX

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commentaires

Y
<br /> Bonjour Monsieur, je découvre votre blogue à l'instant avec cet intéressant article. Connaissez-vous François Asselineau, il a rédigé plusieurs très bons papiers à ce sujet. Bien à vous, YB<br />
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